Aujourd'hui, c'est mon anniversaire - Paris
Théâtre Elizabeth Czerczuk
- Paris, 75012
- Du 08/12/2022 au 23/04/2023
- Durée : 1h10
- Tout public
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Mise en scène et chorégraphie d'Elizabeth Czerczuk, inspirée de la dernière œuvre de Tadeusz Kantor avec 18 comédiens-danseurs et un quatuor musical.
Dans son analyse du jeu théâtral de Kantor, Elizabeth Czerczuk a défini plusieurs étapes de travail, déterminant ainsi sa propre approche de l’œuvre Aujourd'hui, c'est mon anniversaire. Entre épisodes de vie en temps de guerre et moments d’évasion dansée et onirique, les scènes jouées font émerger un éventail d’émotions, pas seulement chez les spectateurs mais aussi chez les artistes.
Accompagnée de 20 danseurs et comédiens, d’un quatuor musical (contrebasse, violon, bandonéon, percussions), elle stimule l’ensemble du processus intellectuel et créatif. Ainsi, chacun peut construire son fil de l’intrigue littéraire à partir de ses propres fragments de souvenirs et de ses sentiments. La différence entre Kantor et Czerczuk réside dans les moyens d’expression. Dans l’approche de Kantor, la parole, la scénographie et l’orchestration sont des éléments indépendants. Certes, ils collaborent. Alors que le théâtre de Czerczuk radicalise l’expression, mène à l’incarnation totale de tous les éléments.
Équipe artistique
Auteur(s)
Tadeusz KantorMetteur(s) en scène
Elizabeth Czerczuk
Les avis sur le spectacle
La presse en parle
La TerrasseAprès s’être inspirée des univers de Witkiewicz et Gombrowicz, la comédienne et metteure en scène Elizabeth Czerczuk éclaire la dernière œuvre de Tadeusz Kantor, avec une vingtaine de comédiens et danseurs et un quatuor de musiciens. Au croisement de tous les arts, centrée sur la partition des corps, la troupe orchestre une transe expressionniste envoûtante, nourrie de tragique. C’est une sorte d’espace muséal étrange et hétéroclite, c’est aussi un bar chaleureux et accueillant. Tout proche de la place de la Nation, le lieu atypique dès l’entrée interroge le regard, bouscule la perception. Le pas est franchi vers un théâtre où se joue un art total, qui conjugue le jeu, la musique, la danse et les arts plastiques, qui n’a pas le côté sec d’une simple performance tant il engage le spectateur, non pas pour le provoquer mais pour le toucher, dans une communion collective et secrète. Le théâtre d’Elizabeth Czerczuk aime à se fonder sur la sensibilité et la culture polonaises, qui nourrissent son imaginaire. La comédienne et metteure en scène a grandi à Wroclaw en Pologne, où vécurent Henryk Tomaszewski et Jerzy Grotowski, figures de la scène polonaise, avant de peaufiner sa formation au Conservatoire de Cracovie et au Théâtre Cricot2 de Tadeusz Kantor, maître dont les écrits théoriques et les spectacles créèrent un théâtre novateur d’avant-garde, comme l’a montré l’emblématique Classe morte (1975). Après Stanisław Ignacy Witkiewicz en 2020 (Dementia Tremens) et Witold Gombrowicz (Yvona) en 2019, c’est la dernière œuvre de Tadeusz Kantor qui inspire Elizabeth Czerczuk. La troupe d’une vingtaine de danseurs et comédiens accompagnée par un quatuor de musiciens propose une transe savamment rythmée où le corps joue un rôle essentiel et signifiant, où les pulsations et les gestes structurent une partition ponctuée de motifs récurrents. Les situations sont incarnées sans être réalistes : elles préservent le mystère de l’être, à jamais incompréhensible. C’est très beau, très touchant, si on accepte de se laisser porter par cette forme originale où priment l’expérience et l’émotion. Un théâtre viscéral Dès le début s’affirme la dimension tragique de l’existence avec l’abandon d’un nourrisson. La pièce enchaîne des scènes et tableaux expressionnistes où se confrontent deux groupes. Un groupe d’acteurs figure une humanité disparate, fragile, apeurée et pourtant souvent soudée, avec notamment une écolière et un prêtre. Des rires éclatent, des corps se figent, des expressions multiples habitent les visages, lors de processions et incursions. Un groupe de danseurs incarne quant à lui les pulsions guerrières, comme toujours l’Histoire avec sa grande hache se répète sans que les hommes se réfrènent. Des valises-baïonnettes menacent, des chaises se transforment en armes, la mort surgit à tout moment. De somptueux tangos s’emparent des corps marionnettiques, et la musique ici, comme l’acte artistique en soi, contrecarrent la tristesse et font vivre les fantômes. Quelques rares paroles, principalement en polonais, sont dites. La disparition brutale de Tadeusz Kantor le 8 décembre 1990 tandis qu’il travaillait aux répétitions a interrompu l’achèvement du spectacle. Il est heureux qu’Elizabeth Czerczuk et les siens éclairent à nouveau cette œuvre par un théâtre organique, viscéral, imprégné des malheurs du monde et de la nécessité de vivre. Et de créer. Agnès Santi